LES ECRIVAINS DE MA GENERATION
Nés dans les années 60, les écrivains de ma génération, récompensés par des prix littéraires, imposent désormais de manière évidente la force de leurs voix.Ils ont en commun d'avoir connu la fin des Trente Glorieuses, la fin des idéologies, les années Sida. Ils gardent une certaine nostalgie de leur enfance et de leurs adolescence, bien au fond du nid douillet de leurs pensées et de leurs rêves. Frédéric Beigbeder ( né en 1965) en fait « Un roman Français » ( Grasset) publié en 2009 ( Prix Renaudot) qui vient de sortir en poche ( avec une préface de Michel Houellebecq). Rappelons qu'en janvier 2008 Beigbeder a été arrêté ( avec un ami écrivain Simon Liberati) en possession et usage de cocaïne sur la voie publique dans le 8 ème arrondissement de Paris et qu'il a connu l'enfer de la garde à vue pendant quelques jours. Cet événement est à l'origine du livre, il remplit plusieurs chapitres et sert de mise au point pour Beig. Amnésique tout d'abord, il recouvre la mémoire de sa jeunesse. Les souvenirs d'enfance et d'adolescence affluent peu à peu. Roman initiatique qui permet à Beig de dresser comme une sorte de bilan comme si le jeune homme de treize ans jaugeait l'homme de quarante ans. Que suis-je devenu finalement s'interroge-t-il et que dois-je répondre au jeune homme de treize ans de la fin des années 70 ? Il y a une part de gravité mélancolique dans ce roman. On peut se demander si malgré des allures frivoles d'écrivain mondain, Beig se sent bien dans sa peau... C'est tout autre avec David Abiker ( né en 1969) et son « Zizi the Kid » publié cette année chez Robert Laffont. Même si les deux écrivains ont en commun d'avoir fait Sciences Po, d'avoir travaillé dans la communication ( Beig dans la pub et Abiker dans la finance) et d'être présents dans les médias comme chroniqueurs et animateurs ( Beig animateur sur Canal + Cinéma et son émission Le Cercle, Abiker avec Nicolas Demorand le soir sur Europe 1 et sur France 2 avec Franz-Olivier Giesbert dans Semaine Critique le vendredi soir), dans les années précédentes (Beig sur Canal + dans L'Hyper Show , et aussi sur Paris Première, Abiker sur France 5 dans Arrêt sur Images et puis aussi sur France Info). Il y a aussi la presse écrite ( Beig dans Voici, Lire, le Figaro et GQ, Abiker dans Marie-Claire, GQ, L'Express...). Alors que Beig semble être un adolescent tourmenté et timide, Abiker lui est un obsédé sexuel qui mime avec une gamine de son âge l'acte d'amour, nus mais les jambes serrés ! A treize ans , il s'aperçoit que sa panoplie de Spiderman qu'il arborait fièrement plus jeune est devenue trop petite et le rend ridicule ! Beig est certes lecteur de comics et fan des livres de Sf et passe à la télé chez les Bogdanoff mais s'empêtre dans son identité pubère, devient vite amoureux de ces jeunes filles pas forcément jolies, portant des lunettes à double-foyer, avec qui il danse des slows inoubliables, le coeur battant à se rompre ! Là, nous sommes en plein dans la Boum, Sophie Marceau etc... Cependant, l'un et l'autre ont le sens de la famille, du partage. Beig parle toujours trente ans après avec une certaine tendresse de son grand-père de Guétary ( Pays Basque) comme Abiker aussi de sa grand-mère. Beig est fils de divorcés, père chasseur de têtes, mère traductrice de livres à l'eau de rose, le père d'Abiker est directeur du personnel et sa mère travaille dans la confection. Beig a souffert de la séparation de ses parents et Abiker médite sur sa judéité. Mais tous les deux ont connu le Manège Enchanté, la télé en couleurs, Casimir,les super-héros, la fascination pour les magazines interdits ( Lui , Playboy...), l'éveil des sens, les affiches des films pornos, bref, toute une époque bien révolue, avant les SMS, Internet, Facebook et la télé-réalité ! Et dire que nous les enfants nés dans les Golden sixties avons connu tout cela et que nous devons faire avec notre époque où nous ne nous sentons peut-être pas si à l'aise que ça ! Nous les vieux ados qui écoutons toujours U2, Bob Marley, the Clash ou les Rita Mitsouko, nous les enfants de Claude François, Joe Dassin, Il était une fois, le Big Bazar ou Mike Brant... OUI, JE LE REPETE, NOUS SOMMES DES RESCAPES ! Car c'est un miracle si nous avons traversé les années 80-90 et leurs vicissitudes sans presque trop d'encombres ! Nous tenons sans doute grâce à la madeleine de Proust de nos premières années...
ERIC DUBOIS
( Chronique lue dans l'émission Le lire et du dire du 25 janvier 2011 sur Fréquence Paris Plurielle, 106.3 fm )